Superman : l'écho de notre époque

Bien que passé par l'écurie Marvel et aujourd'hui en place chez DC Studios, James Gunn n'a jamais perdu sa vision d'auteur. Qu'il s'agisse de mise en scène ou d'écriture, le réalisateur originaire de Saint-Louis (Missouri) impose sa vision du cinéma grand spectacle - mais aussi sa lecture de la société - sans faire de compromis, peu importe s'il s'agit d'une grosse production ou non. Aujourd'hui, il a trouvé la meilleure caisse de résonnance pour partager ses idées : Superman.

Dépouillée de tous ses artifices, la mythologie de Superman est simple et limpide : suite à un drame familial, un enfant migre dans un autre environnement pour trouver sa place dans une société qui, en partie, le rejette. Ça vous dit quelque chose ? Dans un monde marqué par les crises migratoires et la résurgence d'idéologies nationalistes incarnées notamment par les politiques anti-immigration de Donald Trump aux États-Unis, Superman résonne comme un symbole d’accueil mais aussi de résilience. James Gunn l'a d'ailleurs rappelé tout récemment auprès d'un journaliste du Times : " Superman, c’est l’histoire de l’Amérique. Un immigrant venu d’ailleurs... ". Pas sûr que cela plaise dans les couloirs de la Maison Blanche...

Et ce n'est pas la seule lecture critique contemporaine dont est capable l'archétype du super-héros, souvent jugé - et de façon injuste - démodé. Superman représente cette figure rare : celle de la bonté pure. Un extra-terrestre - devenu homme parmi les hommes et femmes - uniquement bon, qui aide sans attendre de reconnaissance dans une époque dominée par l'agressivité, surtout en ligne. À ce sujet, et toujours dans l'article du Times, James Gunn ajoute : " il y a une méchanceté qui est apparue à cause des figures culturelles qui sont méchantes en ligne. Et je m'inclus dans cela. C'est à l'infini, des millions de personnes font des crises de colère en ligne. Comment sommes-nous censés avancer en tant que culture ? Nous ne savons pas ce qui est réel, et c'est une situation très difficile pour le cerveau humain. Si je pouvais appuyer sur un bouton pour faire disparaître l'internet, j'y réfléchirais ". Une prise de position un peu extrême de la part du co-PDG de DC Studios ? Pas vraiment quand on se replonge dans ses précédentes productions comme The Suicide Squad ou la série The Peacemaker, où les comportements agressifs et écervelés sont critiqués avec la malice d'un sale gamin.

J'en profite du coup pour faire un petit aparté - meta - sur un autre point de vue concernant Superman et plus particulièrement son alter ego Clark Kent. Cette lecture, c'est le personnage de Bill (parfaitement interprété par David Carradine) qui nous la partage dans Kill Bil Vol. 2.

Je vous traduis :  « Clark Kent est la façon dont Superman nous voit. Faible, peu sûr de lui, lâche. Clark Kent est la critique de Superman sur l'humanité toute entière ». Encore une interprétation pertinente du super-héros sur l'humanité et, plus particulièrement, sur notre époque. Cette vision grinçante rappelle la difficulté intrinsèque à être altruiste dans un monde où l’égocentrisme est devenu une norme. L'illustration de cet article capture parfaitement l’insouciance contemporaine qui caractérise nos sociétés.

Superman n'est donc plus simplement un personnage issu des pages d'un comics : il est devenu, et demeure, un commentaire de ce que nous sommes aujourd’hui. Entre générosité et indifférence, accueil et rejet, Superman symbolise nos contradictions et nous rappelle, peut-être, que nous avons tous·tes le pouvoir d'être un peu meilleur·es. Candide le petit Sébastien ? Peut-être. Mais à la lecture de tout cela, est-ce que Superman n'est pas le héros dont nous avons tous·toutes besoin, maintenant ?

Sébastien

Responsable de la communication