Samia Hilmi : " C'est un peu bizarre de revenir à des moments calmes après la frénésie de Cannes "

Samia Hilmi a tourné dans son premier film - et non des moindres - puisque réalisé par les frères Dardenne. Dans Jeunes mères, l'actrice carolo incarne l'une de ces mamans qui aspirent à un avenir meilleur pour elles et leur enfant. Après la frénésie cannoise, où le film a remporté le prix du meilleur scénario, Samia nous a accordé un peu de temps pour parler d'elle et sa future carrière au cinéma.

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- Samia Hilmi, bonjour !
- Bonjour !
- Tu es de retour au Quai10, trois semaines après avoir présenté Jeunes mères en présence de Jean-Pierre et Luc Dardenne. Comment vas-tu, alors que toute la frénésie de Cannes est passée, et que le film est sorti en France en Belgique ?
- Ça va très très bien, franchement. C'est vrai que ça fait un peu bizarre de passer d'un moment où tout se passe très très vite, à un moment où il n'y a plus rien du tout. En plus là, mes examens sont passés aussi, donc je suis vraiment dans un vide total. Mais je dirais que ça fait du bien. Parce que c'était... enfin, énergivore.
- Est-ce que ce que tu as vécu à Cannes est encore plus fou que ce que tu avais imaginé ?
- Oui. Je suis partie en me disant que j'aurai un petit peu de temps pour moi, j'avais carrément prévu de passer à la plage, de peut-être passer à Nice. Mais pas du tout, ce n'est pas du tout possible. Il y a un planning qui est hyper bien calé et tout se passe très très vite.
- C'est quoi une journée typique à Cannes ?
- Tu te lèves à 7h, tu te douches, tu te prépares, puis tu manges rapidement.
- Tu as passé beaucoup de moments avec les actrices, avec l'équipe, et là maintenant c'est un peu un retour à la vie normale. J'imagine que ce "retour sur terre" est un peu rude.
- Oui, franchement c'était un petit peu compliqué, surtout quand tu passes beaucoup de temps avec les mêmes personnes, qu'on vit les mêmes choses dans un timing hyper pressé, où on se serre les coudes parce qu'on était vraiment épuisés. Et puis là, plus rien. C'est surtout le fait de ne pas les revoir pendant quelques temps qui est un petit peu bizarre.
- Mais de très beaux souvenirs restent, j'imagine ?
- Bien sûr ! De très beaux souvenirs. Parfois je regarde les photos, je me dis "ouah, on a vécu ça et je suis trop contente".
Films
- Est-ce que tu t'imaginais que tout irait aussi vite dans ta carrière au cinéma, sachant que tu allais travailler pour les frères Dardenne, qui ont cette aura déjà dans le métier ?
- Honnêtement, vraiment pas. Déjà, j'étais très étonnée d'être prise, et puis je suis arrivée sur le tournage et tout s'est super bien passé. J'avais des idées sur comment ça pouvait se passer, je les connaissais bien sûr à travers leur cinéma, leur réputation, le fait qu'ils vont souvent à Cannes, que les films sont assez connus, mais le vivre, c'est autre chose. C'est hyper différent.
- Travailler avec les frères Dardenne, c'est quelque chose de bienveillant, tu nous le confirme ?
- Exactement. C'est quelque chose d'hyper doux, en fait. Tu te sens hyper accompagné, un peu dans une bulle où tu dis "ok, peu importe ce qu'il se passe, ils sont là pour m'aider". Et que ce soit les frères ou toute la production derrière : chaque personne, même si tu les as rencontrés le jour même, elles vont être là, elles vont te soutenir.
- Parle-nous de toi, Samia, et du cinéma. Comment en es-tu venu à passer un casting pour jouer dans un film ?
- Alors, un peu par hasard. Je faisais du théâtre depuis quelques temps, et je m'étais toujours dit que si je devais faire quelque chose dans l'art, ce serait du théâtre, c'est-à-dire sur scène parce que j'ai beaucoup ce rapport au public, le direct. D'ailleurs, j'ai joué récemment au Théâtre de Poche, et c'était juste trop bien. Ça m'a rappelé tous ces souvenirs de théâtre d'ailleurs. Mais quand je suis allée à Mons pour étudier, j'ai pris des cours avec d'autres professeurs, qui étaient plus dans le côté acting, cinéma, etc. Et ça m'a donné envie de tester. Une prof m'a envoyé le casting, et c'était mon premier.
- Et puis tout s'est emballé ?
- Voilà. Tout s'emballe, et on en arrive là.
- Tu as étudie à Mons mais tu es donc originaire de Charleroi.
- Oui, c'est ça, je viens de Charleroi. De base, j'ai fait des années de science en secondaire, puis mes deux dernières années de secondaire, je les ai fait en artistique, en pluridisciplinaire, toujours à Charleroi.
- On a d'ailleurs pu le voir lors de l'avant-première avec cette standing ovation de tes anciennes congénères venues spécialement pour toi.
- Je n'étais pas du tout au courant qu'elles viendraient ! Je ne savais pas du tout, et j'étais très étonnée, très émue aussi. J'avais un peu envie de pleurer, surtout que j'étais là avec les frères, sans les autres filles, et ça m'a vraiment remonté le moral.
- Tu dis que tu es tombée dans le cinéma un peu par hasard. Est-ce que tu avais des goûts malgré tout, des films qui t'ont marqué récemment, plus anciens, des souvenirs par rapport au cinéma ?
- Oui, alors depuis que je suis à Mons, je vais de temps en temps dans un petit cinéma qui est très sympa, le Plaza, une petite salle très sympathique. J'ai vu quelques films là-bas, j'ai vu The Mother of All Lies, qui était assez sympa. J'ai vu Les Fantômes, avec Tahar Rahim qui est très bien dedans. C'est vrai que c'est des films un peu compliqués à voir, qui ont une histoire assez forte. Je pense que c'est ça surtout qui me plaît. C'est des films vrais en fait, et parfois même si c'est de la culpabilité, c'est pour pousser le spectateur à réfléchir et à se remettre en question. C'est ça qui est beau aussi.
- Tu vas voir des films au cinéma, et puis ensuite, tu passes derrière la caméra. Comment imaginais-tu cela ? Est-ce que tu fantasmais un peu tout le côté de tournage d'un film, comme on arrivait à ce résultat ?
- C'est vrai que quand on n'a pas du tout d'idées de à quoi ça ressemble, j'avais un peu l'impression que c'était un truc fantastique, où il y a des caméras partout, où il y a des lumières partout, où il y a plein de personnes sur le tournage. Mais les frères Dardenne ont tendance à travailler avec une équipe pas hyper grande. Il n'y avait aucun travail de lumière. Enfin, après le tournage, oui, sur le plateau c'était que de la lumière naturelle. Ce n'était pas hyper impressionnant, comme ce que j'avais pu imaginer. Et c'est ça aussi qui m'a mis en confiance, je pense.
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- Quels films souhaiterais-tu voir prochainement au cinéma ?
- Il y a beaucoup de films ! Il y a Aïcha, il y a aussi un film qui s'appelle Samia, comme moi et du coup ça m'a un petit peu rendu curieuse, j'avoue. C'est des films que j'aimerais bien voir. Et peut-être Alpha aussi de Julia Ducournau, qui a été présenté à Cannes d'ailleurs. Et aussi, le film qui a gagné la Palme d'or, je ne me rappelle plus du titre (Un simple accident NDLR).
- Le cinéma, aujourd'hui, qu'est-ce que c'est pour toi ? Quel est ton avenir là-dedans ? Est-ce que tu as vu des choses s'ouvrir à toi ? Des pistes que tu voudrais explorer ?
- Il y a quelques portes qui se sont ouvertes. Mais je ne sais pas encore si je vais sauter à pieds joints dedans. Je vais prendre un petit peu plus de temps pour réfléchir, prendre du temps pour moi. Puis il y a quand même mes études de psychologie à côté que je n'ai pas du tout envie de lâcher. Mais c'est sûr et certain que je vais encore tenter. Et je vais voir ce qui vient à moi. On verra !
- Charleroi, c'est une terre de cinéma. Il y a beaucoup de films qui ont été tournés ici comme Largo Winch : Le prix de l'argent ou plus récemment Maldoror de Fabrice du Welz. Tourner dans ta région d'origine, ça pourrait t'intéresser ?
- Je n'y avais même pas pensé mais en fait, ce serait assez drôle d'incarner un personnage totalement différent de moi, évidemment, dans les rues que je connais bien. Ouais, expérience à tester, franchement ça a l'air fun !
- Pour terminer, comment as-tu reçu le film Jeunes mères en salle la première fois que tu l'as vu, après le tournage ?
- On n'a pas forcément tourné dans l'ordre chronologique et on l'a découvert quand on a fait une séance, nous cinq et avec nos parents. Jean-Pierre et Luc ne voulaient absolument pas qu'on se voit pendant le tournage. C'est-à-dire qu'on ne pouvait pas se voir dans la caméra, dans les écrans de retour, ni dans des miroirs afin d'être vraiment la plus neutre possible. Donc le découvrir à l'écran, ça été un peu un choc parce que déjà, tu te découvres dans ton costume pour la première fois, et avec le maquillage aussi. C'est très bizarre. La première fois c'était un peu dur et puis quand mes scènes sont passées, je me suis détendue et j'ai vu le travail accompli. Je me suis dit "c'est incroyable" et quand je l'ai vu pour la deuxième fois, là j'étais vraiment bien.
- Merci Samia !
- Merci, c'est très gentil !
Entretien mené par Sébastien Capette, responsable de la communication