Nabil Ben Yadir : "Je trouvais ça intéressant qu'on puisse donner la possibilité aux baronnes de s'approprier un grand texte"
Lors de son passage au Quai10, Nabil Ben Yadir s’est prêté au jeu de l’interview pour partager les coulisses de Les Baronnes. Co-réalisé avec sa maman, ce film est né d’une collaboration intergénérationnelle aussi touchante que réjouissante, qui a fait rire toute la salle lors de l’avant-première.
Dans cet échange, il revient sur le travail en duo familial, sur les défis et la complicité qui ont marqué la création du film, ainsi que sur les messages qu’iels ont souhaité transmettre à travers ce récit plein d’humanité.
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Bonjour Nabil. Est ce que tu sais nous parler de ton film en deux ou trois mots ?
Ça s'appelle Les Baronnes. C'est un film qui raconte l'histoire de Fatima et de ses amies qui vont à un moment de prendre une décision, celle de s'occuper d'elle-même et prendre soin d'elles.
Et quand vous avez des dames, des mamies, des mamans qui ont passé leur vie à s'occuper des autres et qu'elles décident d'arrêter de s'occuper d'elles-mêmes, c'est toute la société qui tremble. Et c'est ce qu'on raconte. Ce film là, en très gros.
C'est d'ailleurs un film que vous avez réalisé avec votre maman ?
Tout à fait!
C'est la première fois que vous travaillez avec elle ?
Oui, je pense que c'est une première aussi. Je ne sais pas s'il y a un autre réal qui a travaillé avec sa mère. J'ai cherché mais je n'ai pas encore trouver. C'est possible. Mais oui, oui, c'est une première et en tout cas oui.
Est ce que c'est vraiment ce que vous aimeriez refaire, revivre ?
Évidement ! Sauf qu'elle m'a dit maintenant qu'elle aimerait bien réalisé un film toute seule. Elle m'a jetée.
Non mais en tout cas, c'est une super belle expérience et je conseille à tout le monde, au delà du cinéma, de faire quelque chose avec ses parents.
Mais j'ai vu justement qu'elle vous a donné cette idée de départ. De s'intéresser aux mamans. Où sont les mamans ? Mais à quel moment du processus vous vous êtes dit que la co-réalisation c'est une bonne idée et on va se lancer à deux ?
C'était une évidence pour moi à un moment donné. C'est que je m'imaginais pas avoir partagé comme ça tous ces moments avec elle, de réflexion sur le film. Et puis d'un coup la "sortir du game" comme on dit et continuer le film tout seul. Je pense qu'elle a été un peu ma boussole pendant tout le film pour que ce soit juste, pour travailler avec moi sur le casting, pour les dialogues et pour que les scènes sonnent juste. Et donc j'avais besoin pour moi de ce repère là. Et au delà du fait que c'est son premier film, j'avais l'impression aussi de réaliser un premier film avec elle.
C'est trop bien, C'est ça d'être une expérience magnifique. D'ailleurs, ça fait 16 ans que les barons sont sortis
Oui !
C'était un film de comédie. Et ici vous revenez à la comédie, qu'est ce qui vous a poussé à revenir à la comédie alors que vous êtes passés par le policier. C'était une envie ?
Ma mère
Ah oui ! La maman.
Ah oui, c'est évident. Et je pense que mon précédent film était très dark. C'était un animal qui était un film important, mais je pense que je pouvais pas aller plus loin dans la noirceur, Dieu merci. Ma mère m'a toujours dit "il faut que tu refasses une comédie, il faut que tu refasses, que tu racontes l'histoire de maman, c'est important." Et je pense que c'était vraiment la meilleure opportunité pour moi de pouvoir revenir à la comédie.
C'est super intéressant, excitant parce que les retours qu'on a, les gens qui réagissent bien aux films, qui applaudissent, qui rient, etc. Je trouvais ça hyper jouissif et même dans les avant premières etc. C'est hyper important parce que c'est vraiment un film qu'on a pensé pour tout le monde, pour les familles.
C'est vraiment un film que moi j'aurais, enfin on l'a réalisé avec ma mère, comme si c'était égoïstement, un film qu'on aimerait aller voir. Égoïstement, un film qu'on irait voir. Donc on a pensé et puis en fait, c'est hyper intéressant parce que ma mère c'est un public en elle même on va dire. Elle est très exigeante et elle aime beaucoup les comédies, etc. Donc en fait, le fait d'avoir co-réalisé le film avec ma maman, c'est comme si vous réalisez votre film avec votre public à côté de vous en permanence, Quand ça rit, ça rit, quand ça rit pas alors que ça doit rire, on doit retravailler la scène , etc. Donc c'est vraiment un truc hyper intéressant,
C'est les meilleurs retours qu'on peut avoir.
Exactement
D'ailleurs, j'ai lu un peu déjà des interviews que vous avez pu donner et vous expliquez un peu votre choix pour Hamlet et pas Mille et une nuits et j'ai trouvé ça très parlant. Je sais pas si vous avez envie d'élaborer un peu plus sur ça et sur le fait que justement c'est une comédie et pas un drame comme on a tellement l'habitude de voir, je trouve ça très puissant.
Non mais moi je trouvais ça intéressant qu'on puisse donner la possibilité aux baronnes de s'approprier un grand texte comme Hamlet de William Shakespeare. Je trouvais ça intéressant qu'elles puissent aussi s'approprier ça, qu'elles aient le droit à la fiction. C'est à dire, c'est pas un film qui est basé sur des faits réels, quoi. Non, c'est vraiment une histoire, c'est une histoire qu'on raconte, on écrit un scénario de fiction, on essaye de mettre des vannes, on essaye de mettre de l'humour dedans, de l'émotion, etc.
Et puis moi je trouvais ça intéressant que ces baronnes puissent s'approprier des grands textes comme celui de William Shakespeare et pas Aladdin, le roi des voleurs.
On a assez vu.
Tout à fait !
Il y a des scènes dansées dans le film. Comment ça a été pour réussir à organiser une troupe de quatre femmes qu'on peut dire avec de l'expérience pour toutes ces scènes dansées qui ont dû être assez fun à tourner ?
Tout à fait. On a fait appel aux plus grands chorégraphes, Sidi Larbi Cherkaoui, qui est un des plus grands chorégraphes au monde. Il a travaillé avec, comme vous le savez, Jazzy, Beyoncé. Il a formé des danseurs qui sont maintenant des chorégraphes. Donc c'est vraiment quelqu'un d'hyper puissant et d'hyper intelligent. Au delà d'être un chorégraphe, c'est un directeur artistique. C'est pour moi un réalisateur, un metteur en scène.
Donc j'avais très très envie de travailler avec lui et donc au culot, je lui ai envoyé le scénario en lui disant "J'aimerais que tu collabores avec moi sur ce film et tout ça." Il m'a dit "Je n'ai pas le temps". Ce qui était vrai parce qu'il était entre la Suisse et New York et le Japon, je crois.
J'ai dit "écoute je t'envoie le scénario et tu me diras". Et donc je lui ai envoyé le scénario, il l'a lu très vite et il m'a répondu "C'est magnifique, mais j'ai pas le temps, mais je vais le faire quand même".
Et donc il l'a fait parce que je pense à la toucher, ça a parlé, ça a résonné, ça a réveillé un truc en lui qui était hyper intéressant, le rapport à la mère et tout ça, et le fait que j'avais envie qu'elle se déploie, qu'elle puisse voler dans les airs, danser, s'amuser.
Et il a été vraiment. Il m'a super bien accompagné et donc il a un cv de fou maintenant. Et ce qui est intéressant c'est que son cv maintenant a grandi puisqu'il a travaillé avec Madonna, Beyoncé, Jazzy et ma mère.
Ma mère est dans le CV de Sidi Larbi Cherka oui.
C'est la meilleure anecdote qu'on puisse expliquer quand on veut présenter sa maman.
Voilà exactement.
gallery
Le film s'intitule Les Baronnes. Votre premier film, c'est Les Barons. Pourtant, il y a par Molenbeek, pas vraiment une suite. Pourquoi ce choix de titre ?
Il y a un lien avec, évidemment Les Barons. Il y a le personnage de Lucien, Jan Decleir qui fait un lien avec le film, mais en fait c'est pas une suite, c'est c'est une évidence.
C'est à dire que Les Barons, c'est un film de son temps, on est en 2009, etc. Les Baronnes, c'est un film de son temps maintenant et je pense que s'il doit y avoir un lien, c'est... En fait, l'idée des Baronnes. C'est ma mère qui m'a dit c'est super, les barons, c'est très bien, mais tu ne parles pas des mères, les grands mères, etc.
Tu parles plutôt du père et du fils. Voilà. Elle avait entièrement raison, donc ça a été comme un challenge. J'avais peur d'avoir déçu ma mère et et puis voilà. Puis faire une suite, ça n'avait aucun sens. Tu vois ? Et moi ce que je voulais, c'est raconter celles qui était déjà dans les barons, mais qu'on ne voyait pas.
Donc elles sont là déjà Les Baronnes dans les Barons, mais on ne les voit pas. Et donc c'est parce que moi je n'avais pas,... ma caméra qui était un peu serrée sur les garçons. Il fallait juste que je déplace un peu plus la caméra. eEt on se rend compte que les Baronnes ont autant, si pas plus d'humour que les Barons. Elles ont de l'auto-dérision comme les barons. Et puis, pour moi, c'est la continuité. Mais même si on parle des parents et des grands parents, c'est un film qui va de l'avant.
Rien qu'à voir la bande annonce, ça donne extrêmement envie. Même l'affiche, vraiment tout ce qu'il y a autour donne très envie. Donc j'ai très hâte de pouvoir le découvrir avec le public. Un dernier mot ? si vous aviez un message à transmettre avec les baronnes, qu'est ce que vous aimeriez transmettre ?
Avec Les Baronnes, je me rappelle d'une discussion qu'on avait eue lors d'une projection avec les Baronnes. Les baronnes avaient dit "Il n'est jamais trop tard pour réaliser son rêve". Fatima, dans le film, réalise son rêve, celui de jouer Hamlet.
Les baronnes réalisent un peu leur rêve en jouant dans un film et j'espère qu'elles continueront et je serai là pour les accompagner. Ma mère réalise son rêve à son âge, de réaliser un film alors que c'est elle qui m'a donné envie de faire du cinéma. Donc je pense qu'il n'y a pas de limite d'âge et il n'y a pas de date de péremption et il n'y a pas de limite.
C'est à dire que les gens ont l'impression que, à un certain âge, on arrive vers la fin. Et en fait, moi ce que j'ai envie de raconter, c'est que c'est le début de quelque chose. Et que c'est comme une renaissance, comme une naissance.
Et je pense que c'est ça qui est intéressant, c'est que de voir des baronnes qui réalisent leurs rêves enfuis finalement, parce que tu vois, c'est des personnes qui ont répondu à une annonce finalement. Donc il y a eu quand même un appel.
Il y a eu l'allumette, c'est les baronnes. Moi j'ai juste allumé le briquet. C'est elle les flammes, c'est elles qui tiennent, tu vois ? Un briquet, quand tu l'arrêtes ça s'éteint, l'allumette elle reste. Et donc moi je trouvais ça intéressant que, qu'il y a un film dans un film, que finalement le rêve des baronnes dans le film se reflète aussi dans la réalité.
Pour moi, c'est important,
C'est important, c'est super beau. Ben merci beaucoup,
Mais merci à vous. Et vive le Quai10! C'est la première fois que je viens.
Et bien il faudra revenir avec tous vos prochains films maintenant.
Avec grand plaisir. Invitez-moi et moi je viendrais !
Merci beaucoup !
Merci à vous. Merci.