Despelote, un plaidoyer pour le jeu vidéo sincère et artisanal
Loin des productions massives, le jeu Despelote se présente dans une simplicité déconcertante. Cette œuvre mélancolique et sincère est la preuve éclatante que le jeu vidéo est un média narratif incontournable, à la hauteur du meilleur du cinéma.
Despelote nous plonge à Quito, en 2001, à travers les yeux de Julián, un enfant qui porte le même nom que le créateur du jeu, l’équatorien Julián Cordero. En cette année, l’Equateur vit une grande crise économique causée par l’arrêt de l’utilisation de sa monnaie, le sucre, pour passer au dollar américain. Mais Julián, du haut de ses huit ans, est marqué par tout autre chose : la potentielle qualification de l’équipe de football équatorienne à la coupe du monde.
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Dès les premières secondes du tutoriel, où les commandes nous sont expliquées à travers une partie d’un jeu fictif de football inspiré des classiques sur NES, on comprend très vite tout l’amour qui est porté au média. Le gameplay, d’une simplicité folle, ne peut pas vous faire peur. Tout ce que vous pouvez faire c’est vous déplacer, taper dans une balle et dialoguer avec les personnages. Pas de game over, pas de complexité, pas de pression : une simple tranche de vie racontée à la première personne. On se retrouve ensuite projeté dans cette ville, basée sur les vrais décors de Quito, et agrémenté d’un grain rétro et de couches de poussière desquels ne ressortent que les personnages et les ballons de football. Despelote se veut être un bout d’histoire locale, comme une effervescence organique qu’on pourrait comparer à la vague de positivité de nos diables rouges en 2018.
Si vous doutiez encore du potentiel du jeu vidéo comme outil narratif, Despelote ne pourra que vous convaincre : il aurait très bien pu être un film de deux heures et être tout aussi bon. L’attrait de l’interactivité du jeu vidéo trouve ici son sens dans le fait de contrôler un enfant, libre et insouciant, qui découvre le monde qui l’entoure au travers de sa passion. Despelote est rempli d’idées de mise en scène tout en ne sortant jamais de sa contrainte d’être un jeu vidéo. Il fait également preuve d’une sincérité à toute épreuve qui s’entend dans la voix de son narrateur, si fier de nous présenter son projet et son histoire au fil de l’aventure.
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Ce genre de proposition intense et mélancolique ne peut exister qu'à travers le monde du jeu vidéo indépendant. On imagine très difficilement un gros éditeur offrir un budget conséquent à un équatorien souhaitant raconter ses souvenirs d’enfance dans un jeu de moins de 2h. Ces projets ne sont donc pas seulement à apprécier : il faut aussi les soutenir et les partager, pour montrer qu’une telle alternative possède bel et bien un public prêt à en recevoir d’autres.
Mathéo
Animateur de l'Espace jeu vidéo